Situation au collège des Battières : ce dont les personnels ont besoin,ce ne sont pas des discours, mais des actes !

Le 9 novembre, questionné par sa classe de cinquième au sujet d’une vidéo attribuant des propos islamophobes à Emmanuel Macron, un enseignant d’histoire-géographie a cherché à déconstruire la fake news, dans le contexte médiatique chargé qui a suivi l’hommage à Samuel Paty.

Ses propos, non compris, déformés, sont rapportés par deux élèves d’une fratrie à leur père, qui se rend au collège quelques heures plus tard, et prend à partie l’enseignant, l’accusant d’avoir tenu en classe des propos islamophobes, alors que l’enseignant a au contraire rappelé la nécessité d’éviter tout amalgame.
Cet enseignant a donc été pris à partie par le parent d’élève qui lui a prêté des propos qu’il n’a jamais tenu, sur la base de propos rapportés par ses enfants qui ont compris l’exact contraire de ce que disait l’enseignant.
Convoqué le 12/11 au collège par la principale, le parent d’élève refuse toute médiation et prétend nier à notre collègue la possibilité d’évoquer en cours des « questions de géopolitique » ainsi que la mort de Samuel Paty.
L’incident aurait pu être immédiatement réglé par un soutien institutionnel fort : une convocation de la famille par le rectorat en vue d’une médiation visant à rappeler les missions de l’éducation nationale, rétablir la vérité des faits pour restaurer la dignité de notre collègue.

Si le rectorat a bien accordé la protection fonctionnelle à l’enseignant qui a porté plainte pour diffamation faute d’excuse du parent concerné, le collègue n’a eu aucune réponse à ses demandes de suivi et ce depuis le 20/11 /2020. Le rectorat, après plusieurs relances, a reçu l’enseignant en audience le 1 0/1 2/2020, audience au cours de laquelle nous avons assisté notre collègue. Il avait à ce stade repris le travail depuis le 07/1 2/2020 alors même que les parents n’avaient pas été reçus et que les élèves étaient toujours affectés dans la classe dont il avait la charge.

Il a donc fallu cette audience et une forte insistance pour que le rectorat envisage la convocation de la famille. Selon le rectorat il aurait fallu « une demande explicite » de la victime. Le collègue pensait encore à ce stade qu’une médiation pouvait restaurer sa dignité professionnelle, rétablir un climat serein, permettre également d’envisager la scolarisation des élèves dans un établissement mitoyen par souci d’apaisement, dans l’intérêt des élèves comme des personnels. Son premier choix n’a donc jamais été, comme cela a pu être affirmé, de changer d’établissement, mais simplement de restaurer sa dignité professionnelle, obtenir un soutien institutionnel, et retrouver un climat serein de travail.

A l’issue de cette audience, les représentants du rectorat s’étaient engagés à convoquer la famille, à « suivre l’affaire de près », et d’ouvrir le dialogue avec la famille afin d’envisager la continuité de la scolarité dans un autre établissement. Une invitation a été envoyée à la famille pour être reçue en date du 17 décembre. Le parent ne s’est cependant pas présenté, refusant tout dialogue. L’enseignant n’a pas été informé de cette absence à la convocation. Il a fallu qu’il se rende de lui même dans le bureau de la direction à 10h00 après qu’il ait réalisé deux heures de cours.

La même semaine, l’un des deux élèves a introduit un couteau dans l’établissement. A ce stade, l’autorité de tutelle aurait pu engager une procédure disciplinaire, et, à cette occasion, recevoir les parents pour évoquer de nouveau un changement d’établissement dans l’intérêt des personnels comme celui des élèves. Elle ne l’a pas fait. L’élève n’a reçu qu’une sanction d’un jour d’exclusion, pour des faits qui relèvent ordinairement d’un conseil de discipline, comme cela avait été le cas quelques semaines avant dans le même établissement. Par ailleurs, cette infraction relève également du pénal. La CGT Educ’action du Rhône a alerté dès le 1 8 décembre le rectorat de Lyon par courrier sur la situation délétère qu’une telle gestion faisait peser sur le collègue et sur les personnels, et lui a demandé de prendre des mesures de nature à restaurer un climat serein. Ce courrier est resté sans réponse.
Ce dernier incident a rendu de fait impossible, pour le collègue, la poursuite de l’exercice de ses fonctions dans l’établissement. La charge mentale était devenue trop lourde. S’il a accepté une affectation temporaire et envisage une reconversion c’est pour retrouver de la paix. On ne peut donc présenter cette situation comme « un choix », et encore moins suggérer que la gestion des incidents par l’autorité administrative n’en est pas la principale responsable.
La gestion de cette situation révèle une nouvelle fois le décalage entre les discours public concernant le « soutien aux personnels éducatifs » tenus par le ministère et la réalité des actes, lorsque les personnels sont pris à partie dans l’exercice de leurs fonctions.
Ce dont ont besoin les personnels, ce ne sont ni de grandes déclarations d’intention, ni des discours de stigmatisation ou d’instrumentalisation politique, mais d’un soutien institutionnel fort, immédiat et réel lorsqu’ils sont victimes de violences, y compris de violences verbales, dans leur quotidien professionnel. La culture du « pas de vague » qui conduit au départ des victimes, qu’il s’agisse des élèves et du personnel, perdure malgré les engagements ministériels.

Les textes en matière de santé au travail prévoient pourtant que le chef de service a une obligation de résultat en matière de santé et de sécurité des personnels. Pour ne pas rester un vœu pieu, au cours de l’audience de ce mardi 06 janvier, le DASEN du Rhône a pris des engagements concernant le traitement de cet incident. Nous attendons des actes qui restaurent la dignité professionnelle de notre collègue, un climat serein, et qui permettent la rescolarisation des élèves dans un autre établissement, afin de retrouver un climat propice à l’apprentissage de toutes et tous.

Nous resterons donc particulièrement vigilant-e-s pour que les actes suivent les engagements pris.

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